« L’investissement socialement responsable » ne connaît pas la crise

Publié le par Alexis Carré



Les encours français de l’ISR ont progressé de 30 % l’an dernier. De plus en plus d’investisseurs prennent en compte ces critères sociaux et environnementaux

Les turbulences qui secouent les marchés financiers depuis l’été dernier, avec la crise du subprime aux États-Unis, n’ont pas tari l’engouement pour l’« investissement socialement responsable » (ISR), qui consiste à intégrer des critères de nature sociale et environnementale aux critères financiers classiques. Au contraire, la crise l’aurait même stimulé. C’est le constat dressé par Novethic, une filiale de la Caisse des dépôts, qui présentait hier la cinquième édition de son enquête annuelle sur le marché français de l’ISR.

Les encours ISR détenus par les investisseurs hexagonaux ont ainsi augmenté de 30 % sur un an, pour atteindre 22,1 milliards d’euros. Certes, il s’agit encore d’une goutte d’eau par rapport aux plus de 2 500 milliards d’euros que représente la gestion d’actifs en France, mais la progression de l’ISR est tout de même rapide. Au début des années 2000, l’ISR n’était qu’une niche pesant à peine quelques centaines de millions d’euros. Entre-temps, le contexte a changé, avec notamment la prise en compte des nouvelles contraintes environnementales. Mais ce n’est pas la seule explication. « Il y a aujourd’hui une perte de confiance des investisseurs. Avec l’affaire Enron, la crise des subprimes et l’histoire de la fraude à la Société générale, les marchés ont besoin de se trouver de nouveaux repères et de donner une plus grande lisibilité à leur portefeuille. En redonnant de la confiance dans le système, l’ISR apporte une partie de la réponse », souligne Jean-Pierre Sicard, le président de Novethic. Selon lui, les investisseurs, notamment les compagnies d’assurance, sont de plus en plus nombreux à prendre en compte les analyses extrafinancières, au point que l’encours français de l’ISR, pris de manière très large, avoisinerait les 66 milliards d’euros.

Des fonds spéculatifs commencent également à adopter des critères ISR pour une partie de leurs investissements. Un vrai progrès, même si l’objectif des gérants alternatifs s’inscrit d’abord dans un souci de sécuriser leurs placements plutôt que dans une démarche éthique. Une étude du cabinet Altédia montre ainsi que les fonds ISR ont réalisé l’an dernier une performance financière supérieure aux fonds d’actions traditionnels, avec des différences de 1 à 4,2 % selon les indices de référence.

En France, l’ISR continue d’être porté par les investisseurs institutionnels, qui représentent les deux tiers des encours, avec une hausse de 36 % en volume l’an dernier. Trois poids lourds se dégagent : le Fonds de réserve des retraites (FRR), la Caisse des dépôts, mais aussi l’Établissement de retraite additionnelle de la fonction publique (Erafp), la structure créée par la loi Fillon de 2003 pour gérer le régime de retraite complémentaire par capitalisation des agents de l’État. « La France se rapproche des modèles de l’Europe du Nord, où les fonds publics représentent le gros du marché de l’ISR », souligne Dominique Blanc, directeur de la recherche de Novethic.



7 Mai 2008
La Croix

Publié dans marché

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